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Crise de l’énergie: des technologies de combustion durable à l’étude

Publié le 9 novembre 2022 Mis à jour le 15 décembre 2022

En mars dernier, l’Europe connait une flambée des prix de l'énergie qui, depuis lors, n’a fait que s’aggraver. Aussi, de nombreuses voix s’élèvent pour augmenter les investissements dans les technologies renouvelables. Ce serait toutefois oublier que certains procédés industriels doivent nécessairement brûler des combustibles pour fonctionner. Quelles sont alors les alternatives? Éléments de réponse avec Alessandro Parente.

Certaines entreprises sont-elles davantage touchées par cette crise énergétique?

Alessandro Parente : Toutes les entreprises sont impactées, des petites entreprises et artisans indépendants aux grandes entreprises, mais surtout celles très énergivores, comme les industries travaillant dans le secteur de l’acier et du verre, puisqu’elles dépendent beaucoup du gaz pour leur processus de production (les fours, notamment).

Vos recherches portent justement sur l’étude de nouvelles technologies de combustion durable, qu’est-ce que ça implique?

Alessandro Parente : La combustion durable repose sur deux idées : produire de l’énergie à partir de sources renouvelables et pouvoir la stocker sous forme de molécules chimiques – telles que l’hydrogène, l’ammoniac, et d’autres combustibles de synthèse appelés électrofuels ou e-fuels – qui sont utiles pour stocker beaucoup d’énergie sur le long terme. La seconde idée est de disposer de technologies qui permettent aux industries d’exploiter ces molécules dans leur processus de combustion, sans polluer.

Vous travaillez notamment sur la combustion MILD (Moderate or Intense Low oxygen Dilution). Comment fonctionne-t-elle, et quels sont ses avantages?

Alessandro Parente : Avec MILD, les combustibles et l’air sont dilués avec une forte recirculation de gaz brûlés. La concentration d’oxygène diminue alors fortement et la combustion est plus lente. On peut donc davantage la contrôler. Or, augmenter le contrôle sur ces processus permet d’avoir des systèmes de combustion beaucoup plus efficaces (la combustion est étendue à l’entièreté du système de manière homogène) et quasi-non-polluants. MILD représenterait aussi une technologie très flexible, qui pourrait s’adapter à tous les combustibles.

Où en est la recherche aujourd’hui?

Alessandro Parente : Les recherches ont débuté au début des années 2000, et la technique est encore beaucoup étudiée. On ne comprend pas encore très bien les mécanismes moléculaires qui règlent cette combustion très distribuée dans le système. Mes recherches portent notamment sur l’étude de ces systèmes, en combinant des modèles de simulation numérique à des méthodes d’apprentissage automatique (NDA : cette approche permet aux logiciels d’«apprendre» et d’élaborer des scénarios à partir de données). Le but est de guider le développement de nouvelles technologies de combustion et de mieux accompagner les industries dans leur prise de décision.

Cette crise permettra-t-elle d’accélérer la transition énergétique ?

Alessandro Parente : Paradoxalement, cette crise pourrait freiner, dans un premier temps, la transition. A la suite de la pandémie, et maintenant de la crise énergétique, il y a un gros problème de capacité de production, et donc de disponibilité en matières premières, en matériaux, en terres rares, en main d’œuvre, … qui sont essentiels pour développer des technologiques alternatives. Plusieurs scénarios ont été établis pour 2030 et 2050 pour décarboner le secteur industriel, et les trajectoires pour y parvenir deviennent aujourd’hui de plus en plus incertaines.

Camille Stassart