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Mars 2020 : Les travailleurs en lockdown

Publié le 17 décembre 2020 Mis à jour le 18 décembre 2020

18 mars 2020, la Belgique entre en confinement. Et avec elle des milliers de salariés devant télétravailler tandis que les « entreprises essentielles » devront veiller à mettre en place une batterie de mesures de prévention. Vanessa De Greef, chercheuse et professeure de droit du travail au Centre de droit public – Faculté de Droit et de Criminologie – commente ces mois inédits au regard du droit du bien-être au travail.

La pandémie a impacté le travail et les travailleurs. Notre droit du travail était-il outillé pour les travailleurs dits de première ligne ?

Vanessa De Greef : En grande partie oui, déjà bien avant la pandémie, nous avions une belle législation sur le bien-être au travail, qui a été refondée en 1996 suite à une directive européenne. Bizarrement, le SPF Emploi a créé un guide générique en réponse à la pandémie en faisant un « shopping » dans les dispositions légales et réglementaires existantes. Et encore plus étrange, le gouvernement fédéral se réfère principalement à ce guide plutôt qu’à la loi ! Nous avons une belle législation et réglementation décrivant toutes les mesures imposées aux employeurs et nous ne l’appliquons pas ! 

Le guide du SPF Emploi diffère-t-il de cette législation ?

Vanessa De Greef : Le guide rappelle une série de règles existantes mais il en passe aussi sous silence, comme par exemple l’obligation de refaire une analyse de risques face à la COVID-19 et de réorganiser le travail en conséquence. À présent, le guide mentionne qu’il ne porte pas préjudice à l’application des règles existantes mais en pratique, le guide semble être devenu la norme maximale en termes de bien-être au travail. 

Rappelons tout de même qu’initialement, la check-list proposée ne prévoyait même pas de travailler avec les Comités pour la prévention et la protection au travail (CPPT) alors qu’ils sont un acteur-clef du bien-être au travail. Les CPPT pourraient aider à identifier les risques et les réponses à apporter ; contribuer à mesurer si le lieu de travail est un lieu de contamination - aujourd’hui, on l’ignore toujours ! 

Beaucoup de dispositions actuelles sont assorties de la formule « dans la mesure du possible ». Qui mesure ce qui est possible ? Et qui est sanctionné ? Entre le 18 mars et le 28 août, quelque 6.000 contrôles ont été effectués par la Direction Générale Contrôle du bien-être au travail (la principale inspection sociale en charge du contrôle du bien-être) : plus de la moitié des entreprises ont reçu un avertissement pour manquement aux règles de distanciation sociale ; seulement 168 ont été sommées de se mettre en ordre dans un délai donné et 15 ont fait l’objet d’un pro justitia. Ce signal envoyé aux entreprises ne crée pas un incitant à appliquer les mesures de prévention. 

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Nathalie Gobbe