Publié le 19 mai 2023 Mis à jour le 3 juillet 2024

L’Antarctique est une région du monde où le changement climatique est particulièrement rapide. Par ailleurs, la biodiversité y est très mal connue. Au cours de leurs expéditions, Bruno Danis et son équipe jouent donc une course contre la montre pour recenser les espèces présentes dans l’océan Austral.

« En Antarctique, la vie marine dépend des régimes de glace », explique Bruno Danis. « La mer gèle une fois par an et cette glace est un gros réservoir d’énergie puisqu’elle contient des microalgues, de zooplanctons, etc. Au moment de la débâcle, quand la glace fond, il y a donc un largage de nutriments qui va fournir un énorme boost dans l’écosystème. »


Or le changement climatique bouleverse ces équilibres, notamment par des précipitations qui ne sont plus toujours de neige mais de pluie. « Il y a cette pression environnementale très forte couplée au fait que nous manquons de connaissances sur la biodiversité dans cette région. Nous utilisons donc des modèles mathématiques – à l’instar des chercheurs du GIEC – pour déterminer où les changements vont se passer de manière la plus intense et quels endroits doivent donc être échantillonnés en priorité. »

Grâce à ces méthodes, les chercheurs ont pu sortir de l’eau environ 600 nouvelles espèces au cours de l’une de leurs premières expéditions, alors que le taux moyen de description avec les méthodes traditionnelles est d’environ 3 espèces par an ! « Sans ça, on en aurait pour des centaines d’années de boulot alors que parallèlement, le changement climatique opère de manière brutale. » Bruno Danis le concède : difficile, lorsqu’on est confronté chaque jour à l’urgence, de résister tout à fait à l’anxiété. « Et puis, il y a la frustration lorsqu’on essaie de transformer nos résultats en processus concrets de conservation et qu’on se retrouve confrontés à des lenteurs, des calculs géopolitiques, etc. Mais l’inventivité, la créativité, la collaboration avec des grands réseaux internationaux nous permettent de voir de mieux en mieux où l’on va. »