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La généralisation du télétravail à Bruxelles : quels impacts sur notre quotidien ?
Dans son dernier numéro, la revue scientifique « Brussels Studies » s’intéresse aux potentiels effets de l’intensification du télétravail à Bruxelles depuis la pandémie. Comment sa généralisation impacte le bien-être des bruxellois, mais aussi l’économie, l’emploi, l’immobilier, la mobilité, et même les finances publiques ?
La crise du Covid-19 a profondément bouleversé notre manière de travailler. En effet, pendant plusieurs mois, une large partie de la population belge a expérimenté, souvent pour la première fois, le télétravail complet. D’abord envisagé comme une façon de limiter les contacts, celui-ci s’est progressivement ancré durablement, en s’intensifiant là où il était déjà pratiqué et en s’étendant à de nouveaux postes et secteurs autrefois non concernés. Combien de personnes sont concernées par ce phénomène et avec quelle fréquence ? Que sait-on des conséquences du télétravail sur l’économie bruxelloise ? Les tendances observées à la sortie des confinements se sont-elles installées et que prévoit-on pour l’avenir ?
Le 194e numéro de la revue scientifique Brussels Studies analyse les effets potentiels du télétravail à Bruxelles en matière de bien-être, d’économie et d’emploi, d’immobilier, de mobilité ainsi que de finances publiques. Il est le fruit de la collaboration de chercheurs en géographie (Mathieu Strale et Jean-Michel Decroly – IGEAT-GAG, Faculté des Sciences), en économie (Claire Duchêne et Magali Verdonck – DULBEA, Solvay Brussels School Economics Management) et en psychologie (Marine Willeput, Nathan Pudles, Sabine Pohl et Catherine Hellemans – PsyTC, Faculté de Psychologie, Sciences de l’Education et Logopédie) de notre université.
La diffusion du télétravail a pris place dans le contexte d’évolutions sociétales plus larges, comme la flexibilisation de l’organisation de l’emploi, la diversification des parcours résidentiels, de fortes inégalités socio-spatiales dans et autour de Bruxelles, mais aussi les effets de la fédéralisation et des réformes de l’État sur le financement de la Région bruxelloise. Sa diffusion engendre dès lors de nouvelles tensions et recompositions pour concilier vie privée et professionnelle, pour réaménager les espaces de bureaux à l’échelle de la ville et gérer les effets sur le secteur immobilier et les activités et emplois liés, pour répondre aux aspirations des travailleuses et travailleurs en matière de logement et de conditions d’emploi ou adapter l’offre de transport aux nouveaux rythmes de déplacement. En mesurer les effets n’est donc pas chose facile.
Il faut néanmoins rappeler que le télétravail, même dans une ville internationale dont l’économie est fortement tertiarisée, ne concerne directement que la moitié des salarié·es, l’autre moitié n’en vivant que les effets indirects éventuels. La difficulté à envisager les implications du télétravail et à y répondre tient donc aussi au fait que cette nouvelle organisation du travail crée de nouveaux clivages en même temps qu’elle en renforce d’autres : entre ville et périphérie, entre femmes et hommes, entre personnes à faible et haut diplômes, entre petites et grandes entreprises, etc.
Dans ce cadre, le rôle de la puissance publique est fondamental, que ce soit en matière de régulation des conditions de travail, d’immobilier et d’aménagement du territoire, d’activité économique, de mobilité ou de finances publiques. D'autant qu'actuellement, les experts s'accordent sur deux hypothèses – soit une stabilisation, soit une poursuite de la croissance du télétravail à Bruxelles – mais ils n'envisagent pas un retour massif au travail en présentiel.