Les ouïghours, le sujet d’étude qui crispe la Chine

Vanessa Frangville, chercheuse au Centre de recherche sur l’Asie de l’Est (Faculté de Lettres, Traduction et Communication) étudie la production culturelle, notamment audiovisuelle, dans la diaspora ouïghoure. Alors que ça faisait 20 ans qu’elle se rendait régulièrement en Chine, elle n’y a plus mis les pieds depuis 2018 : « Pendant mon dernier séjour, il a été difficile de rencontrer des collègues. Je pense que j’ai été suivie et que mon ordinateur a été fouillé. Par ailleurs, des amis ouïghours ont été intimidés après mon départ. J’ai donc décidé de ne plus y aller, jusqu’à ce que le climat politique s’améliore ».  

Selon elle, tous les experts de la Chine éprouvent aujourd’hui des difficultés à se rendre sur le terrain et à accéder aux données. En outre, la plupart des programmes d’échanges sont à l’arrêt. Et même depuis l’étranger, les tentatives de censure sont réelles : « L’ambassade envoie régulièrement des courriers à l’ULB pour demander le retrait d’articles. Et quand j’ai organisé le colloque relatif aux Ouïghours, l’ambassadeur m’a accusée d’avoir invité des terroristes ».

Si la liberté académique en Chine s’est dégradée ces dix dernières années, « la période actuelle est probablement l’une des plus complexes pour les chercheurs, qu’ils soient étrangers ou chinois ».

Vanessa Frangville est également la coordinatrice ULB de l’exposition « Poser pour la liberté ». Née du dialogue entre le photographe Pierre-Jérôme Adjedj et la chercheuse Pascale Laborier (Université de Nanterre, curatrice), l’exposition retrace, à travers des témoignages et des récits photographiques, les parcours de scientifiques exilés, la façon dont l’exil a impacté leurs recherches mais aussi leurs histoires individuelles.