Publié le 22 mai 2025
– Mis à jour le 22 mai 2025
En Antarctique, les algues de la banquise jouent un rôle vital pour les écosystèmes marins et le climat : elles se situent à la base de la chaine alimentaire et régulent la quantité de CO₂ dans l’atmosphère. Cette « prairie invisible » est cependant menacée par les changements climatiques. Une étude coordonnée par François Fripiat, chercheur au Laboratoire de glaciologie de l’ULB, a estimé la production de carbone de ces algues.
Elles sont invisibles, microscopiques, et pourtant essentielles. Les algues qui vivent dans et sous la banquise antarctique jouent un rôle clé dans l’écosystème marin de l’océan Austral. Une étude récemment publiée dans
Geophysical Research Letters remet ces organismes au centre de l’attention scientifique. Grâce à l’analyse de
362 carottes de glace prélevées entre 1989 et 2019, les chercheurs livrent une
nouvelle estimation de la production de carbone assurée par ces algues :
jusqu’à 33 millions de tonnes par an, soit
15 à 18 % de la production primaire de la région.
Cette activité biologique est une ressource cruciale pour le
krill, qui nourrit à son tour poissons, manchots, phoques et baleines.
« Ce sont les fondations de l’écosystème antarctique. Si elles disparaissent, c’est toute la chaîne alimentaire qui vacille », résume François Fripiat, coordinateur de l’étude et chercheur au Laboratoire de glaciologie, Faculté des Sciences, Université libre de Bruxelles.
Et
les menaces sont bien réelles. La
fonte accélérée de la banquise liée au réchauffement climatique fragilise cet habitat discret mais vital. Moins de banquise, c’est
moins d’algues, donc
moins de nourriture pour la faune marine.
Des effets sont déjà visibles sur certaines espèces.
L’enjeu dépasse la seule biodiversité.
L’océan Austral joue un rôle majeur dans le cycle global du carbone, en absorbant une partie du CO₂ atmosphérique. Si les algues déclinent fortement, cette
fonction de régulation climatique pourrait être compromise.
L’étude repose sur une
vaste compilation de données, parfois difficilement accessibles.
« Il a fallu recenser des décennies de recherches et convaincre des équipes de partager leurs résultats », explique le chercheur. Un effort collectif porteur de nouvelles perspectives.
Dans un nouveau projet, Trapped in Ice, financé par le
Human Frontier Science Program (HFSP), François Fripiat s’intéressera aux
mécanismes de colonisation de la glace par les algues et à leur
adaptation à des conditions extrêmes : températures < -30 °C, salinité élevée, obscurité prolongée.
Lien de l’étude : Observation-Based Estimate of Net Community Production in Antarctic Sea Ice - https://doi.org/10.1029/2024GL113717