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Criminalisation de la solidarité envers les migrants

Publié le 16 juin 2023 Mis à jour le 16 juin 2023

La criminalisation de la solidarité envers les migrants va de l’intimidation jusqu’au procès. Pour Mathilde Du Jardin, chercheure en criminologie à l’ULB, cette criminalisation est à comprendre dans le contexte d’une criminalisation plus générale de la migration.

« Comme le disait déjà Salvatore Palidda en 1999, les problèmes sociaux sont  perçus comme des problèmes d’insécurité, et les problèmes d’insécurité sont perçus comme venant essentiellement des étrangers et des migrants », explique Mathilde Du Jardin.


Depuis les années 80, la diminution des possibilités de migration légale va de pair avec une gestion sécuritaire de la migration. Ceux qui aident les migrants sont aujourd’hui criminalisés, comme l’a montré en Belgique le « procès de la solidarité ».  Le cadre législatif – article 77 de la loi sur les étrangers de 1980 et article 77 bis relatif au trafic d’êtres humains – prévoit pourtant que l’aide à l’immigration irrégulière ne soit pas punissable si elle se justifie par des motifs humanitaires. « Ce cadre est critiqué depuis longtemps par certains juristes pour son manque de précision », pointe Mathilde Du jardin. Par ailleurs, le procès n’est que « la forme la plus aboutie de ces processus de criminalisation ».

« Une procédure judiciaire, c’est hyper dissuasif car hyper intrusif, détaille la chercheure. Mais il y a une forme de continuum, depuis le contrôle social par les médias jusqu’aux actes administratifs qui ont comme effet de dissuader les citoyens dans leur mobilisation », explique-t-elle. Or cette criminalisation affecte aussi les journalistes, les humanitaires et jusqu’aux ONG reconnues. « On va ainsi empêcher les bateaux de sauver des personnes en Méditerranée, la distribution de nourriture dans certaines villes frontière, etc. » Des pratiques qui découlent de l’obsession des états européens quant à la migration irrégulière, alors même que certains d’entre eux – et singulièrement la Belgique – ont été condamnés pour leur mauvaise gestion de l’accueil par la Cour européenne des droits de l’homme.