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UE : un défaut de solidarité en matière d’asile
En matière d’asile, il existe une répartition fortement inéquitable des responsabilités au sein de l’UE entre les états de première entrée et les autres pays. Un défaut de solidarité qui pourrait à terme menacer l’espace Schengen.
Dans les années 90, l’espace Schengen a permis de créer un espace sans frontières intérieures entre les pays européens. Le système de Dublin a pour sa part établi les critères de compétences pour le traitement d’une demande d’asile. Considéré comme une réalisation majeure de l’UE, l’espace Schengen/Dublin crée pourtant une situation très inéquitable entre les états.
" C’est presque un défaut congénital de cet espace ", estime Philippe De Bruycker, professeur à l’ULB et spécialiste du droit européen de l'immigration et de l'asile.
La responsabilité repose sur les pays de première entrée, par exemple la Grèce ou l’Italie. Or un pays ainsi situé ne peut assumer ses responsabilités que s’il est aidé. Avec l’arrivée de près d’un million de personnes, principalement venues de Syrie en 2015-2016, cette question de la solidarité est devenue prégnante. " Pour l’instant, c’est un peu la quadrature du cercle", résume Philippe De Bruycker. "Les institutions travaillent aujourd’hui à trouver un accord entre ces pays avant les élections européennes de 2024... "
Deux pistes sont envisagées : d’une part, la relocalisation, avec le transfert des demandeurs d’asile vers d’autres États membres moins surchargés ; d’autre part, la solidarité financière qui consisterait à financer certaines infrastructures ou projets. « Un certain nombre d’états récusent la relocalisation : ce sont donc les transferts financiers qui semblent le levier le plus facile à activer. Mais cela risque de n’être qu’un emplâtre sur une jambe de bois : pour répondre aux défauts structurels de l’espace Schengen/Dublin, il faudrait non pas financer des projets ici ou là, mais réaliser d’énormes transferts financiers pour rééquilibrer l’ensemble. » Sans quoi un rétablissement des contrôles aux frontières intérieures n’est pas à exclure avec l’effondrement de cet espace unique.
« Si on résolvait la question de la solidarité, on pourrait au contraire espérer que les états s’ouvrent un peu plus », conclut Philippe De Bruycker.