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Dépendance aux drogues : un nouveau mécanisme inattendu découvert

Publié le 8 janvier 2024 Mis à jour le 8 janvier 2024

Des chercheurs de l’ULB Neuroscience Institute, UNI découvrent un nouveau mécanisme majeur dans la dépendance aux drogues et en particulier l’addiction à la cocaïne. Leur étude publiée dans la revue Nature Communication ouvre la porte à de nouvelles voies thérapeutiques.

La dépendance aux drogues provoque chaque année presque 12 millions de morts dans le monde, plus que tous les cancers réunis et aux Etats-Unis, c’est la première cause de décès chez les 18-45 ans !

La dépendance aux drogues est définie comme un trouble chronique récurrent caractérisé par la recherche et la prise compulsive de drogues malgré les conséquences néfastes. Le premier moteur de l’addiction est l’augmentation « artificielle », suite à la prise de drogues, de la concentration de dopamine, le neurotransmetteur associé au système de la récompense, dans la région principale de ce système, le striatum ventral. Cette augmentation artificielle piège ainsi le système de la récompense et induit des modifications dans le cerveau conduisant à l’addiction.

Cette maladie psychiatrique est due à des facteurs génétiques et environnementaux. La composante génétique de la vulnérabilité d'une personne à l’addiction est de 40 à 60% et implique des gènes spécifiques liés aux neurotransmetteurs et à leurs actions, tels que la dopamine, les récepteurs opioïdes, nicotiniques et cannabinoïdes. Dans une étude précédente, l’équipe d’Alban de Kerchove d’Exaerde, chercheur en Faculté de Médecine, Université libre de Bruxelles et ULB Neuroscience Institute (UNI), investigateur Welbio au WEL Research Institute, avait démontré grâce à des modèles murins le rôle central d’un gène insoupçonné dans la dépendance à la cocaïne : Maged1. Son inactivation dans l’ensemble du cerveau de la souris rendait en effet celles-ci totalement insensibles à l’effet de la cocaïne.

Dans une nouvelle publication qui vient de paraitre dans Nature Communication, la même équipe a démontré que la région du cerveau où ce gène joue son rôle essentiel dans l’addiction était en réalité située en dehors du circuit de la récompense, ce qui était complètement inattendu.

Suite à l’identification de cette nouvelle région-clé (le thalamus paraventriculaire), les mécanismes qui sous-tendent les effets majeurs du gène Maged1 dans la dépendance à la cocaïne ont été mis à jour.

Les mécanismes identifiés sont tout aussi nouveaux que le thalamus paraventriculaire dans le phénomène de l’addiction. Ils impliquent en effet des modifications épigénétiques spécifiques, soit des modifications de la structure de l’ADN et non pas des mutations. Ces altérations épigénétiques influencent l’expression d’un grand nombre de gènes. De plus, l’inhibition d’un des nouveaux gènes identifiés comme partenaire de Maged1 pour ces modifications épigénétiques, USP7,  abolit aussi des comportements addictifs. Les facteurs environnementaux aussi impliqués dans l’addiction induisent également des modifications épigénétiques qui sont stables dans le temps et peuvent expliquer le caractère chronique de cette maladie.

Finalement, pour démontrer la pertinence chez l’homme de ces mécanismes identifiés et découverts chez la souris, une étude chez des patients dépendants à la cocaïne a été réalisée en collaboration avec une équipe de psychiatres de l’Université de Paris Cité. Cette étude chez l’homme a démontré que des modifications génétiques spécifiques des gènes Maged1 et USP7 sont associées à des conséquences très significatives sur des comportements directement liés à l’addiction à la cocaïne.

L’ensemble de ces résultats, qui démontrent par ailleurs l’intérêt des modèles animaux dans la recherche sur les maladies psychiatriques, constitue un espoir de nouveaux traitements dans la dépendance aux drogues, et particulièrement dans la dépendance à la cocaïne qui, à ce jour, ne bénéficie d’aucun traitement efficace.

Avec le soutien de WELBIO, FNRS, ARC, Fondation Simone et Pierre Clerdent, Fondation ULB, Fondation Cigrang.

 

Contact scientifique

Alban de Kerchove d’Exaerde

Université libre de Bruxelles, ULB Neuroscience Institute (UNI)

Alban.de.kerchove@ulb.be