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Le passé géologique du Groenland nous informe sur le réchauffement climatique actuel

Publié le 18 juillet 2023 Mis à jour le 25 juillet 2023

Les sédiments prélevés sous un ancien carottage de glace révèlent qu’au moins 20% du Groenland était verdoyant il y a 416 000 ans, ce qui correspond à un passé récent à l’échelle géologique. Cette étude, publiée dans la revue Science, a été réalisée par une équipe internationale de scientifiques, dont le Laboratoire de glaciologie de l’Université libre de Bruxelles. Elle contribue à mieux comprendre l’impact de la fonte de la calotte glaciaire du Groenland et à renforcer les projections futures de hausse du niveau marin.

Une nouvelle étude publiée dans la revue Science montre qu'au moins 20 % du Groenland était déglacé dans le passé géologique récent (il y a environ 416 000 ans). Le périmètre de l’île était alors couvert par un paysage mixte de glaces, de toundra, d'arbres et parcouru par des mammouths laineux.

Les résultats de cette étude récente permettent de mieux comprendre la stabilité de la calotte glaciaire du Groenland au cours des deux derniers millions et demi d'années, dans des conditions climatiques pas très différentes des conditions actuelles : un réchauffement modéré (avec des températures mondiales moyennes de 1 à 1,5 °C au-dessus des valeurs pré-industrielles) pendant 30 000 ans, de 420 000 à 390 000 ans . Ces conditions ont entraîné la fonte d'au moins 20 % du volume total de la calotte glaciaire du Groenland.

Ces recherches inédites ont été menées par un groupe de scientifiques international composé de chercheurs dont les expertises sont complémentaires (glaciologues, sédimentologues, géochronologues, géochimistes). Jean-Louis Tison, chercheur au Laboratoire de glaciologie, Faculté des Sciences, Université libre de Bruxelles a travaillé dans l’équipe de première ligne qui a manipulé, décrit, et fait les premières analyses sur ces archives sous glaciaires exceptionnelles.

« À cette époque, la fonte du Groenland a provoqué une élévation d'au moins 1,5 mètre du niveau de la mer, malgré des niveaux atmosphériques de dioxyde de carbone bien inférieurs à ceux d'aujourd'hui (280 contre 420 ppm) » explique Jean-Louis Tison, co-auteur de l’étude, avant de poursuivre : « cela nous indique que la calotte glaciaire du Groenland est sensible au changement climatique causé par l'homme et sera vulnérable à une fonte rapide au cours des prochains siècles. »

Étant donné que la dernière période interglaciaire, l’Eémien, a provoqué un recul modéré de la calotte glaciaire (10 % en volume), ces données permettent d'affiner le temps de réponse de la calotte glaciaire et le rythme de sa fonte, à savoir la balance entre l’intensité du réchauffement en termes de températures et la durée de ce réchauffement. En effet, l'Éémien, daté à il y a 120 000 ans, était aussi chaud que la période interglaciaire du stade 11 qui s’est produite il y 400 000 ans, mais a duré moins de 10.000 ans (contre 30.000 ans pour le stade 11). La période interglaciaire MIS11 est reconnue comme la plus proche de notre période chaude actuelle, en termes de forçage astronomique naturel, auquel vient aujourd’hui s’ajouter le forçage anthropique. Sachant que le Groenland a le potentiel pour faire monter de presque 7 mètres de niveau marin global, ces données sont cruciales pour raffiner les modélisations numériques des calottes de glace qui permettent d’anticiper leur évolution dans le futur proche. Il s’agit là d’un enjeu crucial pour la fiabilité des projections futures de hausse du niveau marin en fin de siècle.

Pour obtenir ces résultats, les chercheurs ont utilisé des nouvelles méthodes (datation par luminescence et nucléides cosmogéniques) pour dater la durée de la déglaciation en analysant des sédiments sous glaciaires provenant du premier carottage de glace réalisé au Groenland à Camp Century, une base secrète de l'armée américaine dans les années 1960, pour faire cette découverte.14 instituts de recherches et université sont représentées, donc l’Université du Vermont (Etats-Unis), l'Université de Copenhague, l’Université libre de Bruxelles et le CNRS (CRPG).

 

Contact

Jean-Louis Tison, Laboratoire de Glaciologie
Faculté des Sciences,
Université libre de Bruxelles
E-mail : jean-louis.tison@ulb.be GSM : sur demande