Publié le 16 avril 2019 Mis à jour le 6 mai 2019

Les Incas, profanateurs de tombeaux ? L’étonnante découverte d’une équipe d’archéologues de l’Université libre de Bruxelles à propos des momies de Pachacamac au Pérou.

Un cimetière datant d’il y a plus de 1000 ans vient d’être découvert dans le grand site de Pachacamac, sur la côte Pacifique du Pérou, non loin de Lima.

Les défunts étaient emballés dans des couches superposées de filets de fibres végétales et de feuilles. Selon le Pr Peter Eeckhout (CReA-Patrimoine, Université libre de Bruxelles, ULB), directeur du projet Ychsma en charge des fouilles, les momies ont été enfouies parfois à plusieurs, dans des fosses creusées dans le sable et recouvertes ensuite d’une structure de bois et de cannes de joncs.

Une tombe similaire avait été retrouvée l’année dernière par le projet Ychsma, dans un autre secteur du site. Elle a fait l’objet d’un examen approfondi par CTScan a la Clinica Delgado de Lima. Il s’agit d’un homme d’environ 40 ans, atteint par une série de pathologies extrêmement sévères. « Sans doute le malade le plus gravement atteint que j’ai eu l’occasion de voir depuis plus de 15 ans que nous étudions les momies de Pachacamac », précise le Dr Lawrence Owens (Birkbeck, UCLondon ; UNISA), anthropologue du Projet Ychsma. « Ces gens étaient dans un piteux état, malheureusement pour eux, mais heureusement pour nous », plaisante-t-il. « La plupart des personnes présentes sur le site ont eu une vie difficile, fractures, problèmes de dos, de hanches ... mais les individus de ce cimetière montrent une concentration plus élevée que d'habitude de tuberculose, de syphilis et de fractures osseuses très graves, voire mortelles. Néanmoins, le fait que la plupart d'entre eux soient guéris - et que les malades aient survécu pendant longtemps - suggère qu'ils ont été pris en charge et que, même au tout début de l'histoire du site, les gens prenaient soin de ceux qui étaient moins bien lotis qu'eux-mêmes ».En outre, ajoute le spécialiste, « ce type de momie et sa couverture végétale sont rares et anciennes dans le site, peut-être s’agit-il d’un groupe spécifique jusqu’ici inconnu ».


Vidéo des fouilles réalisées sur le site de Pachacamac en time lapse. 

« Malheureusement, explique l’archéologue Milton Lujan Davila, co-directeur du projet Ychsma, toutes les momies à couverture végétale issues du cimetière fouillé cette année ont été plus ou moins abimées par la construction d’un grand bâtiment juste au-dessus de ce cimetière, et ce, suite à la conquête du site par les Incas, vers la fin de 15e siècle. Curieusement, de nombreux crânes manquent, comme s’ils avaient été prélevés, peut-être pour des raisons liées aux croyances religieuses ».

« Le rapport aux ancêtres était fondamental dans les Andes anciennes » Peter Eeckhout.

«Mais dans ce cas-ci, les Incas qui ont érigé le bâtiment n’avaient aucun rapport de parenté ou de descendance avec ces vieilles momies, sur lesquelles ils sont peut-être tombés par hasard. Ils ne les ont donc pas respectées et les ont en partie détruites au cours du processus de construction. Reste à savoir ce qu’ils ont fait des crânes, nous les cherchons toujours» termine le Pr Eeckhout avec un sourire.

Contact scientifique 

Peter Eeckhout

Directeur du projet Ychsma

CReA-Patrimoine, Université libre de Bruxelles

peeckhou@ulb.ac.be

Tel +32 2 650 24 19 (GSM sur demande)

Contact
Service Communication Recherche : com.recherche@ulb.ac.be