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Des transports publics pour tous? Les trajets dans Bruxelles pour les personnes en situation de handicap

Publié le 17 février 2025 Mis à jour le 17 février 2025

Le géographe Frédéric Dobruszkes (Faculté des Sciences, IGEAT) et ses collègues de l'UCLouvain ont passé au crible l'accessibilité du réseau STIB aux personnes en situation de handicap. Leur conclusion vient de paraître dans le 200e numéro de la revue "Brussels Studies". Leur analyse souligne que se déplacer en transport public à Bruxelles relève trop souvent du défi, avec des temps de parcours rallongés, des correspondances multiples et des aménagements souvent défaillants. Un constat alarmant qui appelle à une amélioration profonde et rapide.

Dans son 200e numéro, la revue Brussels Studies poursuit les réflexions autour de l’accessibilité des transports publics bruxellois aux personnes en situation de handicap. Après avoir fait l’état des lieux des arrêts dans un précédent numéro, le géographe Frédéric Dobruszkes (Faculté des Sciences, IGEAT), le bio-ingénieur Martin Grandjean et l’urbaniste et sociologue Arthur Nihoul (UCLouvain) s’intéressent désormais aux trajets réalisables sur le réseau de transport de la STIB. Est-il possible pour une personne en situation de handicap de se rendre de manière autonome du centre-ville à Uccle, de Jette à l’université ou de Tour & Taxis au Shopping de Woluwe ?

Pour répondre à cette question, les chercheurs ont modélisé les temps de déplacement nécessaires pour atteindre 20 destinations à partir de n’importe quel arrêt du réseau, avec ou sans contrainte de déplacement (en particulier, gestion de la lacune entre quai et véhicule et besoin de signalisation podotactile pour les personnes avec une déficience visuelle). Ils ont également calculé le nombre de correspondances requises ou la distance moyenne de marche lors des trajets ainsi modélisés. Au moment de l’étude (octobre 2022), se déplacer en transport dans Bruxelles sous différentes contraintes de déplacement conduit à des itinéraires souvent plus longs (jusqu’à 68 % de plus selon les contraintes considérées), à plus de correspondances (jusqu’à +70 %) et à plus de distance de marche (jusqu’à 54 % supplémentaires). Ainsi, alors qu’un déplacement sans contrainte un matin de semaine entre Flagey et le campus universitaire du Solbosch dure en moyenne 13 minutes, en raison du nombre de lignes limité et de la conception inappropriée des arrêts autour de l’université, une personne en chaise prendra en moyenne 52 minutes pour effectuer le trajet.

Le déficit d’accessibilité en transport public est patent dans les résultats présentés. Qui plus est, le volet qualitatif de leur étude montre que les trajets adaptés aux personnes en situation de handicap ne le sont qu’à condition que les aménagements soient effectifs : ascenseurs et rampes en fonction, absence d’obstacles sur les trajets de correspondance, arrêt adéquat des bus le long des quais, etc.

L’étude rappelle par ailleurs le rôle structurant du métro à Bruxelles, vers lequel rabattent les lignes de surface. Or, les stations de métro et les conditions d’accès aux rames n’étant pas adaptées, les destinations accessibles de cette façon ou qui requièrent de traverser la ville deviennent de facto très difficilement atteignables, si ce n’est au prix de multiples correspondances et de temps de parcours extravagants, résultat de trajets illogiques et pénibles en surface. Dans la pratique, il est très improbable que des personnes en situation de handicap optent alors pour les transports publics, qui ne sont dès lors pas réellement publics.

Le constat que dresse les auteurs est clair : pour devenirs inclusifs, les transports publics nécessitent une amélioration rapide et massive, en renforçant les mesures déjà mises en place à la STIB et en travaillant aussi à la qualité des espaces publics menant aux arrêts.

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