Publié le 27 août 2025 Mis à jour le 28 août 2025

À Bruxelles, la crise du logement touche d’abord les locataires, mais les propriétaires bailleurs restent encore mal connus. Une étude exploratoire lève le voile sur leurs revenus et dépenses réelles. Un article publié dans la revue Brussels Studies par Margot Dior Peelman et Hugo Périlleux géographes à l’IGEAT, ULB.

Mesure de la rente locative à partir des frais d'entretien
 
Avec un parc de logement vieillissant et plus de 60 % de ménages locataires (contre 35 % au niveau national), Bruxelles connaît une crise du logement aiguë. Entre 2010 et 2020, les loyers ont augmenté de 20 % de plus que l’inflation (mesurée à partir de l’indice santé). Désormais, les loyers représentent plus de 45 % du budget des ménages appartenant aux 25 % les plus pauvres, lesquels renoncent à d’autres dépenses essentielles pour se loger. Cependant, alors qu’il existe une série d’enquêtes réalisées auprès de locataires, les connaissances sur les propriétaires bailleurs restent limitées. En particulier, le coût des frais d’entretien, de réparation et de maintien d’un logement mis en location ainsi que l’ampleur de la rente que perçoivent les propriétaires bailleurs sont encore peu documentés. À travers une étude exploratoire, les géographes Margot Dior Peelman et Hugo Périlleux (Université libre de Bruxelles) apportent des premiers éléments de réponse dans le 205e numéro de Brussels Studies.

Pour l’étude, 15 propriétaires bailleurs ont partagé les données relatives à leurs revenus locatifs et aux dépenses associées aux travaux d’entretien de 22 logements loués : réparation du toit, chaudière, ascenseur, isolation, etc. Ces chiffres, recueillis avec un recul temporel de 1 à 15 ans, étaient commentés lors d’entretiens durant lesquels les propriétaires bailleurs estimaient aussi le temps de travail alloué à la gestion et au maintien en état de leur(s) bien(s) en location.

À partir de ces données sur les frais d’entretien, les auteur·es ont produit une estimation de la rente captée par les propriétaires bailleurs en déduisant du loyer perçu l’ensemble des frais de mise en location (frais d’entretien, impôts fonciers et assurances). La médiane des frais d’entretien obtenus auprès de ces 15 propriétaires interrogé·es s’élève à 10 % des revenus. Par ailleurs, en tenant compte de la fiscalité foncière (estimée à 25 % du loyer), des frais d’assurance et d’éventuelle gestion, l’ampleur de la rente perçue pour les biens étudiés a été estimée entre 50 et 60 % des revenus de la location.

À l’heure des vives tensions budgétaires au niveau régional, cette étude présente un double intérêt. D’une part, l’évaluation des frais d’entretien réels pourrait contribuer à la réflexion menée sur la régulation des loyers et sur la prise en charge de la rénovation des logements. D'autre part, parce que les frais d’entretien d’un bien mis en location sont utilisés dans le calcul de la fiscalité immobilière, à travers la définition du revenu cadastral. Ce dernier est aussi repris comme revenu imposable pour le bailleur. Les loyers perçus ne sont donc pas taxés sur une base réelle, mais via le revenu cadastral lui-même calculé en estimant un loyer fictif duquel sont retranchés des frais d'entretien et de réparation, fixés à 40 % du loyer par les pouvoirs publics (contre 10 % dans l’étude). Une réévaluation de cette part destinée à l’entretien plus en phase avec la réalité modifierait dès lors le calcul du revenu cadastral et pourrait ainsi avoir des répercussions sur la fiscalité et les finances publiques.

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