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Les étudiants en mal de logements
Depuis dix ans, le nombre d’étudiant·es à Bruxelles n’a cessé d’augmenter. Paradoxalement, les pouvoirs publics, universités et hautes écoles ont très peu investi dans des logements accessibles et adaptés à ce public spécifique. Face à l'urgence, il est nécessaire d'appeler à un réinvestissement des autorités régionales dans le logement étudiant et à un recadrage de l’offre privée. C'est le constat émis par divers chercheurs, dont Michel Hubert et Benjamin Wayen, dans un récent article publié par "Brussels Studies".
Faire de Bruxelles une grande capitale universitaire européenne est une ambition largement partagée par les autorités régionales et académiques. Avec 4 universités et 14 hautes écoles sur leur territoire, les 19 communes proposent une offre très vaste d’études supérieures, où sont inscrit·e·s environ 140 000 étudiant·e·s (hors échanges et auditeurs libres). Entre 2011 et 2021, le nombre total d’étudiant·e·s inscrit·e·s régulièrement a augmenté de 45 % et le nombre d’étudiant·e·s internationaux de 57 %.
Cependant, cette croissance rapide n’a pas été accompagnée par une augmentation proportionnelle de logements accessibles et adaptés pour les étudiant·e·s. En conséquence, beaucoup peinent à trouver un logement adéquat et abordable. Une enquête de perspective.brussels réalisée en 2020 montre que 42 % des étudiant·e·s des établissements francophones et 30,4 % des établissements néerlandophones ont eu des difficultés à se loger, avec des loyers moyens compris entre 506 et 606 euros. En réalité, les logements étudiants sont trop peu nombreux ou trop chers pour répondre à cette demande en hausse. Cette pénurie de logements a conduit à une hausse des colocations, souvent plus abordables mais qui empiètent sur d'autres segments du marché locatif, déjà fortement saturé.
Cette situation affecte l'ensemble des étudiant·e·s, qu'ils soient belges, internationaux ou bruxellois, et contribue à creuser davantage les inégalités économiques et sociales. De fait, cela freine ou retarde, du moins, la prise d'autonomie des jeunes adultes, en particulier pour les classes populaires. D'autant plus que, comme le rappelle l'étude, ceux qui ont la chance d'avoir un logement sont souvent obligés de travailler de nombreuses heures par semaine pour compenser les charges, parfois au détriment de leurs études. Les autorités académiques tentent de répondre à cette situation en proposant des lieux d’étude, mais ceux-ci sont également insuffisants. Il est essentiel de comprendre que cette crise ne peut être résolue uniquement par le marché privé. Le logement étudiant est directement lié à la santé mentale, au bien-être et à l’émancipation des individus.
Comme le démontre l'étude, il ne s'agit pas d'une simple question comptable d'inadéquation entre l'offre et la demande, qui ne concernerait que le marché privé, mais bien d'un enjeu de société qui a de réelles implications sur la santé mentale et le bien-être des futures générations. Or, cette problématique semble encore peu prise en considération par les autorités et le gouvernement régional. Des mesures comme le "bail étudiant" et le "label logement étudiant" ont été introduites mais restent limitées. Les auteur·e·s de l'article tentent de mettre en perspective des solutions concrètes face au manque d'investissement du secteur public et à la mainmise du secteur privé sur les logements étudiants : ils appellent à un réinvestissement massif des autorités régionales et à une régulation plus stricte de l'offre privée. De plus, ils suggèrent la création de nouvelles résidences universitaires et l'utilisation de bâtiments existants pour des logements collectifs, accessibles et sécurisés pour les étudiant·e·s. À l'avenir, il est nécessaire d'avoir une approche coordonnée entre les pouvoirs publics et les institutions académiques pour garantir des logements adaptés pour les étudiant·e·s et s’engager fermement à améliorer les conditions de vie et d’étude des étudiant·e·s les plus précarisé·e·s.
Un article de Nele Aernouts (VUB), Nicolas Bernard (UCLouvain Saint-Louis Bruxelles), Michel Hubert (USL-B, ULB), Grégoire Ranson (PLE), Gilles Rasson (Brik), Joren Sansen (VUB), Benjamin Wayens (ULB)
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