Publié le 11 janvier 2024
– Mis à jour le 12 janvier 2024
Nouvelles découvertes dans le traitement du cancer du poumon : le rôle de la protéine Bcl-xL dans le vieillissement des neutrophiles, globules blancs contribuant au développement tumoral.
Les neutrophiles sont des globules blancs essentiels pour notre défense contre les infections bactériennes. Ces cellules patrouillent dans notre organisme pendant 1 ou 2 jours, puis meurent et sont remplacées par de nouveaux neutrophiles. Dans de multiples cancers, leur présence en grande quantité dans le sang ou dans la tumeur est souvent associée à un mauvais pronostic, suggérant que ces cellules jouent un rôle dans le développement tumoral.
Des chercheurs — parmi lesquels une équipe du Biopark Charleroi — ont étudié ces neutrophiles dans le cancer le plus meurtrier chez les hommes et chez les femmes, le cancer du poumon. En utilisant des modèles sophistiqués de souris, ces groupes de recherches, dont celui d’Etienne Meylan (Lung Cancer & Immuno-Oncology laboratory, Institut Bordet, Faculté de Médecine et Laboratoire d’Immunobiologie, Faculté des Sciences), ont récemment observé que les neutrophiles entrant dans la tumeur peuvent avoir une durée de vie plus longue que celle d’autres neutrophiles, et que cette longévité leur confère des fonctions qui favorisent la progression de la maladie.
Dans leur étude publiée dans le magazine EMBO Molecular Medicine, Etienne Meylan et son laboratoire ont démontré les mécanismes moléculaires qui permettent aux neutrophiles de survivre longtemps dans la tumeur. Ils ont révélé qu’une protéine appelée Bcl-xL était indispensable pour le vieillissement des neutrophiles associés aux tumeurs. Anita Bodac, doctorante et première auteure de cette étude, s’enthousiasme : « En découvrant une grande quantité de Bcl-xL dans les neutrophiles localisés à l’intérieur des tumeurs, dans nos modèles ainsi que chez les patients, nous avons voulu bloquer cette protéine afin d’empêcher leur vieillissement ».
Cette idée a porté ses fruits : les chercheurs, en ciblant spécifiquement cette protéine par une approche pharmacologique, ont pu diminuer le vieillissement des neutrophiles sans toutefois perturber les neutrophiles normaux, indispensables à notre défense anti-bactérienne. Dans la tumeur, les chercheurs ont observé que le traitement a causé un remplacement des vieux neutrophiles par des jeunes. « Nous pensons que cette observation est importante, car il y a certainement, parmi les jeunes neutrophiles, des cellules dotées de capacités anti-tumorales » poursuit Anita. Ce traitement, à lui seul, a permis de diminuer la croissance des tumeurs dans des modèles de souris d’adénocarcinomes pulmonaires. Ces résultats suggèrent donc qu’il est possible de cibler un sous-groupe de neutrophiles pro-tumoraux tout en préservant les autres neutrophiles. Et au Prof. Meylan de conclure : « Dans l’ère de l’immunothérapie, beaucoup de nouveaux traitements ont comme but d’activer ou de réactiver les lymphocytes T afin qu’ils détruisent le cancer. D’autres cellules immunitaires, comme les neutrophiles, seront certainement considérées dans le futur afin d’obtenir de meilleures réponses aux thérapies existantes ».